Jean Ceynom, officier de Gendarmerie d’active écrivant sous pseudonyme nous a adressé une nouvelle tribune relative à l’usage des réseaux sociaux par des gendarmes et spécialement par des officiers. Dans cette tribune intitulée “la perversion des réseaux ou l’obsolescence de la décence”, l’auteur se demande pourquoi certains militaires de la Gendarmerie “détournent-ils cet outil si puissant pour se perdre dans les méandres de leur propre image ? ”. Cette prise de position qui n’engage que son auteur pouvant apparaître comme sévère et caustique, reflète néanmoins un certain point de vue existant au sein de l’Arme avec des officiers estimant inutile leur présence sur les réseaux sociaux ou les ayant quittés, déçus du règne de l’entre-soi, de l’auto-congratulation et de l’hypocrisie.
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Avec l’ère numérique où chaque action semble devoir s’inscrire dans un récit virtuel, il est presque impossible d’échapper aux réseaux sociaux. Nous les utilisons, ces plateformes omniprésentes, pour communiquer, pour témoigner de nos engagements, pour mettre en lumière nos réussites. Après tout, quoi de plus efficace que ces outils pour sensibiliser, alerter, et diffuser des messages de prévention au plus grand nombre ?
Dans cette quête, la communication trouve son sens le plus noble. Elle devient alors une mission collective, un moyen de servir l’intérêt général, d’illustrer la raison d’être de notre métier : les autres avant tout. C’est une vocation qui nous pousse à agir, à mettre en lumière ce qui compte vraiment, bien au-delà de notre simple existence.
Un culte de soi déguisé en fausse humilité
Et pourtant, une ombre plane sur cet idéal. Pourquoi, parmi nous, certains officiers notamment, détournent-ils cet outil si puissant pour se perdre dans les méandres de leur propre image ? Pourquoi ces posts où l’on devine un culte de soi déguisé en fausse humilité ? À les lire, ces camarades révolutionnent leur profession à chaque instant, façonnent l’avenir avec des phrases si évidentes qu’elles en deviennent creuses. Ils inondent les fils d’actualité de photos anodines accompagnées de textes faciles, répétant à l’envi un quotidien vidé de sa profondeur.
Ce déferlement constant finit par déranger les esprits les plus sages. Ces publications, si futiles, trahissent une obsession : celle de nourrir leur orgueil et d’assouvir leur insatiable besoin d’exister. Ces individus bâtissent alors leur carrière sur des apparences, sur la forme et le vide, délaissant le fond, cette essence qui devrait pourtant être au cœur de leurs préoccupations.
Car être un “chef”, c’est plus qu’apparaître : c’est inspirer, guider, et porter avec charisme des valeurs qui transcendent les subordonnés…où tout du moins essayer.
Hélas, leur hybris qui les pousse toujours plus à l’extrême sans jamais regarder où ils posent les pieds, les conduit inexorablement vers la chute. L’oubli les guette, l’erreur les rattrape, et avec elle, la perte du sens même de leur mission.
Alors, camarades, il est temps de se reprendre. Cessez de vouloir devenir de faux créateurs de contenu, égarés dans un narcissisme stérile. Soyez plutôt les artisans de l’adhésion, les bâtisseurs de réussites collectives. Reprenez cette lumière que vous dilapidez inutilement, et tournez-la vers ceux que vous servez, ceux qui vous entourent. C’est là, et seulement là, que réside la véritable grandeur!
Jean Ceynom