Ariège : hommage au capitaine Maurice Keller

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Le mardi 13 février, à l’initiative de l’ Unprg de l’Ariège a eu lieu une cérémonie d’hommage au capitaine Maurice Keller, résistant et ancien commandant de compagnie de la gendarmerie départementale de Saint-Girons. Cette cérémonie préparée par le président départemental de l’ Ud09, Honoré Morelis, avec la complicité du lieutenant Jean-Baptiste Giacomoni, commandant la Communauté de brigades (Cob) de Saint-Girons et du lieutenant Johnny Hardelin, commandant en second la compagnie de gendarmerie départementale de Saint-Girons, s’est déroulée en matinée devant la stèle érigée en sa mémoire et implantée devant la Gendarmerie de Saint-Girons.

Cérémonie présidée par la sous-préfète de Saint-Girons, Catherine Lupion et le colonel Frédéric Wagner, commandant le groupement de gendarmerie départementale à Foix, dans la plus pure tradition militaire dirigée par le chef d’escadron Hubert Veillie, commandant la compagnie de gendarmerie départementale de Saint-Girons et ainsi honorer un héros, résistant et discret de la Gendarmerie,

De nombreuses personnalités administratives, militaires, clergé, presse, ont pris part à cette cérémonie d’hommage accompagnées de 10 portes-drapeaux. Les membres du bureau et plusieurs adhérents de l’association étaient présents.

Lecture de sa biographie faite par le colonel Frédéric, Wagner suivie de celle de la dernière lettre adressée à son épouse par une gendarme de la brigade. Chant des Partisans, dépôts de gerbes, sonnerie « Aux Morts », exécution de la marseillaise ont solennisé cette cérémonie.

La sous-préfète Catherine Lupion a pris la parole afin d’ajouter « C’est avant tout la reconnaissance de la nation envers un capitaine de Gendarmerie qui n’a pas hésité a mettre sa vie en jeu pour défendre le pays et soutenir la résistance dans une période extrêmement troublée. Un sens du devoir ultime à l’image du colonel Arnaud Beltrame. Un exemple pour les futures générations « .

Le colonel Frédéric Wagner concluant « Une cérémonie importante pour le devoir de mémoire. Tous les Gendarmes doivent avoir en tête les actions menées par les grands anciens. Des valeurs cardinales pour les militaires de Gendarmerie, de courage, d’abnégation, de dépassement de soi. Au delà des cérémonies de ce type doivent nous faire réfléchir à ce que nous sommes, d’où on vient pour pouvoir aller de l’avant ».

Biographie du Capitaine Maurice Keller, lue par le colonel Frédéric Wagner:

  • D’origine alsacienne, Maurice Keller est né le 10 septembre 1905 à Epfig, dans le Bas-Rhin.
  • En 1934, à l’issue de son service militaire au sein des troupes d Afrique, Maurice Keller s’engage en tant qu’officier de réserve de Gendarmerie et obtient le grade de lieutenant.
  • En mars 1937, le lieutenant de réserve Maurice Keller intègre la Gendarmerie d’active et devient maréchal des logis chef. ll suivra ensuite sa formation d’officier à l’école d’application de Versailles (78) et sera promu sous-lieutenant puis lieutenant en 1939, à l’aube du second conflit mondial.
  • Arès avoir occupé plusieurs postes opérationnels, à Saint-Amand-Montrond dans le Cher en 1940, puis à Lapalisse dans l’Allier en 1941, le 10 novembre 1942, le lieutenant Maurice Keller rejoint la Légion de Gendarmerie de Gascogne et prend la tête de la compagnie de gendarmerie de Saint-Girons (appelée à l’époque section).
  • Le Couserans, comme toute la frontière des Pyrénées est sous haute surveillance des autorités allemandes. Une partie de la Gendarmerie est attentiste. Certains, courageux patriotes, choisissent de résister en faisant preuve de la plus grande prudence. La tâche est d’autant plus compliquée pour un membre des forces de l’ordre, qui plus est commandant d’unité, chargé de veiller à l’exécution des lois et d’obéir aux ordres donnés par ses supérieurs et autorités de tutelle.
  • Animé par une réelle fibre patriotique et une volonté de lutter contre I’ occupant, Maurice Keller s’engage dans la résistance au sein d’une organisation clandestine peu de temps après son arrivée à Saint-Girons. ll s’agit du « service évasion » dirigé par Pierre Delnom-Dedieu (futur sous-préfet de Saint-Girons). ll assurera la sécurité de convois d’évadés vers la frontière espagnole, puis, il aidera les responsables chargés de la mise en place des premiers maquis. ll fera également prévenir les jeunes hommes recherchés pour le Service du travail obligatoire (Sto), qu’il était chargé d’aller convoquer, en les aidant à rejoindre l’Espagne. Enfin, et surtout il mettra à profit son statut afin de faire traîner volontairement certaines enquêtes officielles menées à l’encontre des milieux résistants et notamment celles concernant les filières de passage des Pyrénées, dans lesquelles il prend une part active. Mais également en conservant et dissimulant des informations dont il avait connaissance au sujet de refuges de réfractaires ou de points de rassemblements de passeurs, dans le Castillonnais et plus particulièrement sur la commune de Moulis.
  • En janvier 1943, il défendra courageusement le Gendarme Durand accusé (à juste titre) par les Allemands d’avoir laissé échapper volontairement trois réfractaires au Sto qui étaient confiés à sa garde.
  • En février 1944, il obtient la libération de deux chefs de la Résistance locale (Maurice Gardelle et Pierre Lacroix, chef du MUR : Mouvement Unis de la Résistance des secteurs de Saint Girons et de Castillon) en se portant personnellement garant pour eux, assurant qu’il ne s’agissait pas de résistants mais bien de Pétainistes affirmés.
  • En avril 1944, à l’aide de son véhicule personnel, il permettra l’exfiltration vers l’Espagne de deux passeurs du Biros menacés d’arrestation aux Bordes-sur-Lèz.
  • Enfin, après le débarquement du 6 juin 1944, il donne son approbation aux Gendarmes placés sous ses ordres, désireux de rejoindre le maquis.
  • ll rendra visite également à plusieurs résistants faits prisonniers lors de leur détention et les réconfortera en leur adressant des mots touchants, ce dont plusieurs ont fait mention dans leurs témoignages une fois libérés. Ou encore, fournira des renseignements précieux sur I’ ennemi aux mouvements résistants locaux, grâce à sa connaissance fine de la langue allemande.
  • La multiplication de ses activités clandestines et son attitude, finissent par attirer la méfiance des autorités allemandes et des collaborateurs français et il se retrouve à faire l’objet d’une surveillance accrue des services de renseignements allemands, qui conduira finalement à son arrestation dans la nuit du 10 juin 1944 par la Gestapo. Arrestation avant Iaquelle, il s’adressera une dernière fois à ses hommes, dont certains s’apprêtent à rejoindre Ie maquis dans la cour de la caserne.
  • ll est ensuite interné à la prison Saint-Michel à Toulouse (31) puis déporté le 31 juillet 1944 au camp de concentration de Buchenwald (en Allemagne). Entassé dans un wagon, il prend le temps de griffonner quelques mots à sa femme, ce sera le dernier écrit qu’il restera de lui.
  • Dès son arrivée il se verra affecté au « Kommando de Langenstein » or il est astreint à un exténuant travail de terrassement, douze heures par jour afin de creuser les galeries d’une usine d’aviation souterraine. Entre la moitié et les deux tiers des ouvriers de ce « Kommando » sont morts à la tâche, certaines galeries ont « coûté » un mort par mètre et l’espérance de vie n’y était que de six semaines.
  • Héros discret de la Gendarmerie et de la résistance française, miné par l’épuisement, le froid et la maladie, le lieutenant Maurice Keller s’éteindra en déportation dans le froid et le brouillard allemand au cours de la nuit du 27 au 28 janvier 1945 sous l’anonymat du matricule 69298. Ses cendres reposent avec plus de 900 de ses compagnons de misère au cimetière allemand de Quedlinburg. ll laissera derrière lui une veuve et deux orphelins âgés de 3 et 1 an ainsi qu’une mère ayant perdu son fils, tous demeurant Saint-Girons.
  • Promu capitaine à titre posthume, Maurice Keller est fait chevalier de la Légion d’honneur, cité à I’ ordre de la division et se voit conférer la croix de guerre 1939-1945 avec médaille d’argent ainsi que la médaille de la Résistance française et la Médaille de la déportation et de l’internement pour faits de résistance.

L’Unprg de l’ Ariège remercie vivement tous les militaires de la Gendarmerie pour leur engagement à la préparation de cette cérémonie sous l’autorité du colonel Frédéric, Wagner. L’ Unprg s’engage à ce que cette cérémonie devienne pérenne, si possible.

Toutes les personnes présentes ont été invitées à partager un moment de convivialité.

Honoré Morelis, président de l’Ud09.