Un Gendarme nous a adressé une tribune dans laquelle il analyse le tableau d’avancement 2023. Ulysse Guillaume s’était déjà penché sur le TA 2022 en estimant qu’il était une photographie de l’institution. Cette année, il observe une hausse du taux de sélectivité avec une baisse du taux de promotion, nettement moindre pour les officiers féminins. Cette tribune n’engage que son auteur.
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Tribune d’Ulysse Guillaume
L’analyse portée l’an dernier sur le tableau d’avancement reste valable pour celui de cette année
Deux différences sont notables : la baisse du nombre de promus et l’accentuation de la discrimination de genre. La fermeture des vannes du protocole social de 2016 a réduit considérablement le nombre de promus cette année. La conséquence directe est la baisse du taux de promotion qui passe de 21,66% en 2021 à 17,1%. On augmente la sélectivité en réduisant le nombre d’élus. Rien de plus logique. On pourrait donc s’attendre à une baisse uniforme du taux de promotion homme /femme. Il n’en est rien, au contraire. Le taux de promotion féminin se maintient cette année à un taux avoisinant les 30% (2021 : 29,95 %, 2022 : 29,03 %) alors que celui des hommes enregistre une baisse de presque cinq points, c’est à dire quasiment l’effort général de réduction des promotions pour cette année(2021 : 20,7%, 2022, 16,08%).
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Les chiffres sont présentés dans une note explicative devenue traditionnelle. Les taux de progression homme/femme ne sont évidemment pas mis en vis-à-vis malgré l’évocation de l’engagement déterminé “dans l’objectif d’égalité professionnelle” pour la période 2021-2023. On cherche d’ailleurs le “label” raccrochant le plan d’égalité au plan stratégique GEND 20.24 dans la démarche d’un “aller vers” plus de clarté. On plonge ensuite dans une explication excessive dans sa formulation puisqu’elle contredit les chiffres présentés. “Le vivier de cadres féminins, qui s’est fortement enrichi en volume et en qualité, permet d’aller chercher dans un processus de forte sélectivité des postes à responsabilité en interne tout comme dans la haute fonction publique”. On peut apprécier la mesure dans l’utilisation de l’adjectif qualificatif associé à la sélectivité… alors que le taux de promotion est double s’agissant du genre considéré.
Un “en même temps” nuisible à la cause de l’égalité professionnelle
On pourrait prendre ces éléments de langage comme une plaisanterie, si l’on ne parlait pas de la sélection a priori des plus aptes et des plus compétents peu importe leur genre. On pourrait éventuellement en rire si ces explications alambiquées n’étaient pas acceptées comme la vérité élevée en référence de l’égalité et du mérite.
Pour mieux s’excuser de cette prédominance, on force donc le trait de la promotion des femmes tout en se préservant de les nommer à des postes de direction
Les progrès de l’égalité comme la libéralisation des moeurs n’ont pas abrogé la galanterie, loin de là ! On serait même tenté de citer Madame de Staël à ce propos : “Tout homme de goût et d’une certaine élévation d’âme doit avoir le besoin de demander pardon du pouvoir qu’il possède”. Cela va s’en dire quand on se penche sur les fonctions occupées de chef de bureau, de sous-directeurs ou de directeurs. Tous des hommes ou presque dans les fonctions dites de pouvoir… Pour mieux s’excuser de cette prédominance, on force donc le trait de la promotion des femmes tout en se préservant de les nommer à des postes de direction. Mais s’agissant de la représentation visuelle de notre nouvelle campagne de recrutement comme du porte-parolat, honneur aux dames ! Ce “en même temps” contemporain nuit tout autant à la cause de l’égalité professionnelle, qu’à la sélection des talents de l’institution…