Rapport du HCECM sur les réserves: l’avis du colonel (H) Luc Delnord, président de R.E.S.GEND, la principale association de réservistes de la Gendarmerie

0
Le colonel Luc Delnord (Photo DR)

Le colonel (H) Luc Delnord, figure de la réserve de la Gendarmerie, et président de R.E.S.GEND, principale association de réservistes, donne son avis de praticien sur le rapport du Haut Comité pour l’évaluation de la Condition militaire (HCECM) consacré aux réserves.

Sur le même sujet : Réserves : les 14 recommandations du Haut comité pour l’évaluation de la condition militaire

LVDG Quel est votre avis sur les recommandations du rapport du HCECM sur les réserves? Cela va-t-il dans le bon sens ?

Colonel (H) Luc Delnord : en préambule nous pouvons remarquer que le HCECM s’est intéressé à la question des réserves pour produire ce rapport. Il a le mérite de faire l’état des réserves dans notre pays et l’évolution attendue conformément à la volonté du président de la République, qui prévoit un doublement du nombre des réservistes, soit 80 000 réservistes dans les Armées en 2030 et 50 000 gendarmes de réserve en 2027.

Aujourd’hui, force est de constater que les forces armées et la Gendarmerie ne pourraient pas accomplir toutes les missions qui leur sont assignées sans les réservistes. Notamment en Gendarmerie, la réserve fait partie intégrante de la manœuvre au quotidien.

Mais la concrétisation de la volonté présidentielle ne pourra se faire que si plusieurs conditions sont remplies.

La première de ces conditions est la capacité à dédier et à sanctuariser un budget suffisant pour le recrutement, la formation, l’équipement et le paiement des soldes. 

La seconde est la disponibilité des réservistes. Pour se faire, Il est impératif d’avoir une bonne gestion de ceux-ci et de mieux préciser les relations avec les employeurs.

La troisième appelle une meilleure reconnaissance et valorisation du réserviste tant au sein de l’institution militaire que dans la société civile.

LVDG Quels sont les propositions de Resgend pour améliorer la formation et les conditions d’emploi des réservistes de la Gendarmerie ?

Colonel (H) Luc Delnord : aujourd’hui, la réserve fait partie intégrante de la manœuvre Gendarmerie et le réserviste est parfaitement employé à tous les niveaux des entités administratives (brigade, groupements, régions, gendarmeries spécialisées).

Mis à part l’exercice de la police judiciaire, et des spécialités, l’activité missionnelle est la même que celle de leur camarade d’active de gendarmerie départementale. Les réservistes peuvent être employés de façon autonome sur le terrain (mission de sécurité à bord des trains, mission Poséidon ; ouragan IRMA). Le développement des CIRT (compagnie d’intervention de réserve territoriale) va dans ce sens et devrait continuer de se développer.

Les équipements individuels de protection (armement, tenue d’intervention, gilets pare-balles) sont quasiment identiques à leurs camarades d’active, même si pour certaines missions, il faudrait encore les améliorer, tout étant perfectible.

Au niveau des personnels, nous observons un changement dans le recrutement. Aujourd’hui 75% des effectifs sont des ab-initio qui n’ont aucune expérience militaire. Ce qui a amené le commandement à revoir la formation initiale afin de mieux répondre aux besoins missionnels.

La formation initiale donnée lors de la préparation militaire Gendarmerie (PMG) semble suffisante et répondre aux besoins opérationnels lors de l’affectation des jeunes gendarmes de réserve. Mais la formation continue doit être améliorée. Il faudrait augmenter le nombre d’heures annuelles de celle-ci, notamment pour l’usage des armes et les techniques d’intervention professionnelle. Une directive nationale devrait organiser cette formation.

Certes les budgets sont toujours contraints, mais la formation continue est le gage d’une bonne capacité opérationnelle permettant une meilleure efficacité dans l’exécution des missions, mais aussi de préserver l’intégrité physique individuelle et collective de nos gendarmes.

Si la formation des hommes du rang et des sous-officiers est maîtrisée, hormis la formation initiale des élèves officiers de réserve (EOR) à l’EOGN, la formation continue des officiers subalternes et supérieurs reste à parfaire. 

Compte-tenu de la mise en place des CIRT, commandées par des lieutenants et capitaines de réserve, une formation pour les niveaux chef de peloton et commandant de compagnie devrait être dispensée aux futurs titulaires des postes.

Pour les officiers supérieurs, une formation état-major supérieure adaptée pourrait leur être dispensée. 

Certes quelques places sont proposées aux réservistes pour obtenir des diplômes supérieurs de la Gendarmerie, mais la condition de réserviste, militaire à temps partiel, rend difficile la possibilité de suivre ces formations de plusieurs mois.

L’EOGN, devenue depuis le 1er septembre 2024 l’Académie militaire de la Gendarmerie nationale (AMGN), devrait intégrer ces formations d’officiers de réserve

L’amélioration de la professionnalisation de la réserve passe par un cursus de formation obligatoire. Il serait donc opportun de sanctuariser un budget formation dans le budget global de la réserve.

Aujourd’hui, la formation continue est laissée à l’initiative des Groupements. Le Commandement des Réserves et la Jeunesse (CRJ) devrait établir une directive nationale définissant le volume horaire des différentes formations et les modules à enseigner, à l’exception des formations qui seraient dispensées à l’Académie militaire de la Gendarmerie nationale

Afin d’attirer et fidéliser les réservistes de la Gendarmerie, plusieurs mesures sont mises en place concernant notamment l’emploi et l’accompagnement social. 

En matière de protection sociale des réservistes opérationnels des différentes armées directions et services de la Gendarmerie et des réservistes de la Police nationale, le principe est celui de la réparation intégrale par l’État des préjudices subis dans le cadre du service ou sur le trajet aller-retour et sans détour. Mais tout n’est pas couvert par ce dispositif. Aussi il est important pour les réservistes de souscrire une assurance complémentaire. Pour cela une information claire et complète doit être dispensée à l’ensemble des réservistes sous ESR. D’autre part il faut travailler sur la vitesse de traitement des dossiers (gestionnaires des réserves, SGAMI).

La valorisation du réserviste passe aussi par la reconnaissance au niveau de la chancellerie.

Fût un temps, révolu, où le réserviste Gendarmerie ne pouvait pas avoir la médaille de la Défense nationale. Aujourd’hui, la médaille des réservistes volontaires de défense et de sécurité intérieure (MRVDSI) permet de récompenser l’engagement et les services accomplis par les réservistes opérationnels comme citoyens ainsi que les personnes physiques ou agents publics œuvrant au profit de la réserve. Plus qu’une simple récompense, elle est l’expression de la reconnaissance de la Nation à l’engagement de nos réservistes. 

Mais l’attribution des ordres nationaux et l’avancement dans ceux-ci restent très limités

LVDG : quelles sont les actions de R.E.S.GEND en faveur des réservistes ? 

Colonel (H) Luc Delnord : R.E.S.GEND est d’abord un lien permettant à ses membres de se reconnaitre au sein d’une même entité.

R.E.S.GEND apporte, à travers sons site, de l’information à ses membres tant sur la vie de la Gendarmerie que sur celle de l’association.

R.E.S.GEND porte la vision des réservistes auprès des instances gouvernementales. À ce titre j’ai participé au groupe de travail présidé par le ministre des Armées sur les questions “Réserve” de la Loi de Programmation Militaire. J’ai aussi été auditionné récemment sur le sujet “Réserves” par Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis sur le projet de loi de finances pour 2025 des crédits de la Gendarmerie nationale.

Nous sommes aussi une courroie de transmission entre les réservistes et les instances supérieures de la Gendarmerie, avec lesquelles nous avons d’excellentes relations.

Jamais dans la revendication, nous faisons remonter vers le commandement des idées et réflexions issues du terrain permettant d’améliorer le bien du service, en tant que force de proposition. Par exemple nous avons travaillé avec le CRJ sur la mise en dotation à chaque réserviste d’un gilet pare-balle personnel, comme pour nos camarades d’active.

Ensuite nous proposons à nos adhérents de nombreuses activités sportives : stage para avec obtention d’un brevet pouvant être porté sur la tenue ; plusieurs marches internationales comme la célèbre marche de Nimègue ; des raids comme le raid des Collines de l’Artois (mars), le raid Transavesnoise (juin), le raid de Normandie (septembre) et le raid de Calais Guines (novembre). A ce sujet, je peux signaler les excellents résultats des équipes de R.E.S.GEND qui termine à la première place du Master Raid, qui est le classement général pour les quatre raids cités.

Il nous est arrivé aussi d’aider financièrement des familles dont le père réserviste était décédé en service.

Mais R.E.S.GEND, comme le monde associatif en général, doit faire face à un manque d’engouement des jeunes réservistes pour adhérer aux associations alors que nous avons besoin d’eux pour continuer notre mission qui est d’être à leur service et celui de l’Institution.

Luc Delnord : un long parcours militaire débuté dans l’infanterie

Homme de terrain, ancien combattant, titulaire de nombreuses décorations et brevets militaires (*), le colonel Luc Delnord est issu du service national. Il a servi comme officier de réserve en situation d’activité (ORSA) de 1979 à 1981 au 1er régiment d’infanterie (RI) puis comme officier de réserve de 1982 à 2000 aux 76ème, 24ème et 46ème RI, dater à laquelle il a rejoint la réserve de la Gendarmerie dans laquelle il a servi de 2001 à 2021. Il exercé de nombreuses responsabilités et a notamment été conseiller réserve du groupement de gendarmerie départementale de Seine-Saint-Denis (93) et conseiller réserve du général commandant la GTA).

Incarnation du réserviste de terrain, légitime auprès des réservistes, Luc Delnord est aussi un homme à la fibre associative. Au titre de président de R.E.S.GEND, il est secrétaire général de l’Entente Gendarmerie et vice-Président Gendarmerie de l’UNOR, l’Union nationale des officiers de réserve.

Reconnu par ses pairs et par les autorités militaires, il a été membre du Conseil Supérieur de la Réserve Militaire (CRSM) de 2014 à 2018. Auditeur à l’Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN) , 53éme session, il est aussi auditeur à l’Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure (IHESI) 8ème session et auditeur au Centre des Hautes Etudes sur l’Afrique et l’Asie Modernes (58éme session).

(*) Chevalier de la Légion d’honneur et de l’ordre national du Mérite, il est titulaire de la croix du combattant volontaire, de la croix du combattant , de la médaille des services militaires volontaires échelon “or”, de la médaille de bronze de la Défense Nationale à titre exceptionnel avec agrafes  “Gendarmerie” et “Missions d’assistance extérieure”, de la médaille du témoignage de reconnaissance de la Nation , de la médaille commémorative française agrafe ex-Yougoslavie, de la médaille de l’ONU agrafe Kosovo, et de la médaille de l’ONU agrafe non-art 5 Kosovo. Titulaire d’une maîtrise de droit public, d’un diplôme de 3ème cycle spécialisé “Management Stratégique et Intelligence économique” de l’École de guerre économique, d’un diplôme universitaire “analyse des menaces criminelles contemporaines » de l’Institut de criminologie de Paris, il est délégué général de la sécurité du groupe La Poste et professeur associé à l’École de Guerre Economique. Il est ex-administrateur du club des directeurs de sécurité des entreprises.

R.E.S.GEND : “propager l’esprit de défense et la connaissance du monde de la Gendarmerie”

Association patriotique de la Gendarmerie, signataire de la charte des associations de la Gendarmerie, membre de l’entente Gendarmerie et de l’Union Nationale des Officiers de Réserve (UNOR), R.E.S.GEND, (l’Association nationale des Réservistes Et des Sympathisants de la GENDarmerie), est la plus représentative des associations de réservistes depuis la mise en sommeil de l’ANORGEND.

Propager l’esprit de défense et la connaissance du monde de la Gendarmerie” est l’objectif de R.E.S.GEND qui a pour mission de : – aider à la prise de conscience dans la Nation des problèmes de la Défense, de l’importance de la réserve de la Gendarmerie nationale pour la France, de la nécessité de défendre ses intérêts vitaux dans ce domaine et, pour cela, de disposer d’une réserve opérationnelle à la hauteur de ses missions.

  • – Rassembler le personnel de la réserve afin de mettre en commun l’expérience, partager les réflexions et promouvoir les nouvelles pratiques par tout moyen de communication disponible, et en particulier le réseau Internet et les réseaux sociaux.
  • – Développer et renforcer le lien entre la société civile et les forces armées, notamment avec la Gendarmerie, au sens des dispositions législatives portant organisation de la réserve militaire.
  • – Être une courroie de transmission entre les Réservistes et les hautes instances de la Gendarmerie.
  • – Maintenir et développer des liens amicaux entre ses membres, ainsi qu’avec les autres associations de réservistes, les associations de gendarmes et d’anciens gendarmes, et les associations dont le but est de promouvoir les idées de défense.
  • – Contribuer à l’information des cadres de réserve et faciliter l’utilisation rationnelle de leurs compétences.

L’Association s’interdit toute prise de position en matière politique ou confessionnelle.

Les actions

L’action de l’Association nationale des Réservistes Et des Sympathisants de la GENDarmerie se manifeste en particulier par : – toute action ayant trait à l’esprit de la Gendarmerie, à la Défense ou à la réserve militaire.

– Le soutien du plan d’actions pour les réserves.

  • L’animation de l’Association à tous ses échelons, tant au siège que dans les sections. 
  • – La participation aux travaux des organismes de l’État, à des publications, des conférences, des visites et des actions de formation et d’information, la participation au développement de l’entraînement sportif et militaire, l’attribution de prix et de récompenses et l’édition de la revue “Bleu Défense”.
Publicité