Général Cavallier : “la directive temps de travail est une menace inacceptable pour la protection des Français”

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Gendarme Psig
Le temps de travail ne concerne pas que les activités opérationnelles pour la cour de justice européenne. (Photo DC)

La menace sur les armées et la Gendarmerie de la directive européenne “temps de travail” par le biais de la cour de justice européenne qui pourrait contraindre la France à appliquer cette directive sur les astreintes est réelle et dangereuse. La Voix du Gendarme a demandé au général de division (2s) Bertrand Cavallier, l’un de ses conseillers techniques de réagir. Nous publions ici des extraits de son article à lire en intégralité dans le magazine de mars. Pour lui, elle “est une menace inacceptable pour la protection des Français”

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Le général (2S) Bertrand Cavallier, spécialiste du maintien de l’ordre (Photo DR)

Le général Bertrand Cavallier qui avait déjà écrit sur ce sujet précis dans la revue des officiers de la Gendarmerie Le Trèfle en janvier 2019 sous le titre : “la Gendarmerie: une indispensable clarification” tire la sonnette d’alarme en affirmant en écho à la déclaration de la ministre des Armées devant le Sénat “qu’il s’agit bien d’une question centrale pour la Gendarmerie, non seulement pour elle-même mais pour ce qu’elle apporte à la sécurité de la Nation..

L’officier général, qui rappelle la réaction pour le moins courroucée de la ministre à l’instruction provisoire n°36132/GEND/DOE/SDSPSR/BSP du 8 juin 2016, (*) par laquelle la DGGN entendait se conformer aux prescriptions de la dite directive européenne note que “la mention provisoire de cette instruction qui, compte tenu du cadrage politique clair et très cohérent, aurait pu faciliter son retrait”. “Mais souvent le provisoire en Gendarmerie procède d’une logique du fait accompli..” ajoute malicieusement Bertrand Cavallier.

Une évolution depuis 2019 et le retour d’une militarité assumé

Gendarme en treillis (Photo DC/LVDG)

Détaillant l’évolution de la situation sécuritaire de la France depuis janvier 2019, – ensauvagement de la société, radicalisation des comportements, instabilité d’un corps social de plus en plus éprouvé, syndromes de séparatisme- le général Cavallier constate que la Gendarmerie, sous l’impulsion de son nouveau Directeur général, “a entamé un mouvement de fond portant sur une meilleure conjugaison des impératifs de modernisation et de renforcement de ses atouts singuliers” et se félicite du “retour de la militarité assumé en Gendarmerie”. 

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Temps de travail : deux logiques qui s’affrontent

Cette question du temps de travail “est révélatrice d’une interrogation plus large sur la Gendarmerie et sur son évolution” estime l’officier général, par ailleurs consultant de plusieurs médias nationaux dont la chaîne de télévision Cnews. Pour lui, “de toute évidence” deux logiques s’affrontent :

La première qui rappelle le caractère militaire de la Gendarmerie, et met en avant l’impact préjudiciable d’une telle directive pour la sécurité des Français”.

La seconde qui, s’appuyant sur une prétendue susceptibilité de la base et participant du postulat des droits acquis, s’accroche à l’idée d’un statu-quo consensuel, quitte à ce que cette situation altère la production de sécurité de la Gendarmerie, en particulier s’agissant de l’indispensable contrôle du territoire, en priorité en soirée et de nuit, ainsi que l’exercice de la police judiciaire.”

une complexification accrue de l’exercice du commandement de contact au niveau des brigades et des pelotons avec une programmation du service qui n’obéit plus au primat de la mission mais à celui du respect des fameux droits

Pour lui il y a “une complexification accrue de l’exercice du commandement de contact au niveau des brigades et des pelotons avec une programmation du service qui n’obéit plus au primat de la mission mais à celui du respect des fameux droits”, ce qui fait penser à l’ancien commandant de région que “c’est bien tout le service du quotidien, socle de la « police de proximité » qui est fragilisé par l’application de cette directive”.

La mortifère dynamique mimétique avec la Police nationale  

Une troisième logique consistant “à mettre à plat l’ensemble des dispositions relatives au temps de travail en Gendarmerie pour renouer avec la cohérence pourrait cependant émerger” selon l’officier en deuxième section.

La problématique du temps de travail en Gendarmerie est cependant indissociable d’un questionnement beaucoup plus poussé sur l’évolution de cette institution, qui relève d’une réflexion politique” analyse encore l’officier en deuxième section qui regrette “la mortifère dynamique mimétique, et non suffisamment contrecarrée, avec la Police nationale, un des facteurs majeurs de la mutation constatée de la Gendarmerie, qui l’éloigne de la représentation idéale que l’on veut bien en donner”.

La notion capitale d’astreinte

Aujourd’hui, la singularité irréductible du militaire qui pose le primat de l’impératif fonctionnel est de nouveau mise en avant par le ministre des armées avec comme pierre angulaire la disponibilité qui comprend évidemment en particulier pour la Gendarmerie la notion capitale d’astreinte” poursuit cette figure influente de l’Arme, encore très consultée. “ Gageons que la Cour de justice européenne fera preuve de sagesse en s’opposant à cette entreprise de démolition de la protection des populations européennes. A défaut, les enjeux sont tels qu’ils obligeront à ne pas appliquer ses décisions et à ouvrir un débat de fond sur la logique de la Commission européenne” conclue Bertrand Cavallier qui n’hésite pas à marteler que “la directive européenne est une menace inacceptable pour la protection des Français”.

D.C

(*)  Florence Parly, le 7 novembre 2017: “La Gendarmerie a pris l’initiative de transposer à sa manière cette directive, ce qui est dommageable, pour ce qui concerne la disponibilité des forces dont dispose la Gendarmerie, et aussi malheureusement dommageable pour le reste des forces armées, puisque cela crée une sorte de précédent dont nous ne souhaitons surtout pas l’extension.