Au nom des Oubliés de la Nation, ces militaires des Armées et de la Gendarmerie morts en exercice opérationnel ou à l’entraînement et n’ayant pas été reconnus comme morts au service la Nation, une gerbe sera déposée ce mardi 3 mars sur la tombe du soldat inconnu à l’Arc de Triomphe.
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Cette gerbe sera déposée par Jean-Pierre Woignier qui se bat pour que les militaires décédés dans des circonstances similaires à celles de son fils soient reconnus comme morts au service de la Nation et non morts en service.
Sur son blog, le journaliste spécialisé en défense et sécurité intérieure, Didier Chalumeau, annonce que ce père d’un autre militaire de l’armée de terre, rencontrera le 5 mars à Paris le général d’armée François Lecointre, chef d’état-major des armées, pour « le sensibiliser » à ce qu’il considère comme « une injustice et une iniquité. »
Jean-Pierre Woignier est le père de l’adjudant-chef François Woignier du 3e RPIMa, mort accidentellement le 2 août 2017 à Caylus (Tarn-et-Garonne) en préparant un séjour en Côte d’Ivoire avant une projection au Mali. Le VAB dans lequel il était en tourelle s’est retourné. Ce parachutiste major de promotion à l’ENSOA de Saint-Maixent qui s’était engagé au « 3 » en 2002 préparait sa 14ème OPEX.
Sur son site, les Oubliés de la Nation, Jean-Pierre Woignier explique en détail sa démarche avec nombre de documents.
C’est après le décès de son fils que Jean-Pierre Woignier, entrepreneur de 65 ans sur la Côte d’Azur, débute son combat. François son fils, est promu adjudant-chef et reçoit la médaille militaire à titre posthume lors d’un bel hommage entouré de ses frères d’armes à Carcassonne.
Mais son nom n’est pas inscrit sur le monument aux morts de Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes) où il repose. Et, surtout, son fils Owen n’est pas Pupille de la Nation car l’adjudant-chef François Woignier, est déclaré mort en service et non mort pour le service de la Nation.
Une demande du chef de corps
Jean-Pierre Woignier ne comprend pas car le chef de corps du 3e RPIMa avait officiellement demandé en personne cette mention pour ce soldat d’élite, cité à l’ordre du régiment.
Mais la ministre des Armées, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, refuse cette mention que son prédécesseur avait octroyé antérieurement à plusieurs militaires décédés dans des conditions analogues. Cela se fait au « doigt mouillé » persifle le père du parachutiste sur le blog de Didier Chalumeau.
La ministre des Armées Florence Parly considère que « les conditions du décès accidentel en exercice opérationnel de François Woignier ne relèvent pas de circonstances exceptionnelles » au vu d’un décret de 2016.
Pourtant, ce texte précise que « peut également bénéficier des dispositions du premier alinéa un militaire ou un agent public décédé du fait de l’accomplissement de ses fonctions dans des circonstances exceptionnelles« .
« Les risques liés aux entraînements, aux exercices opérationnels et aux missions intérieures sont pourtant mentionnés sur certains articles du site internet du ministère des Armées et dans le rapport du haut comité de l’évaluation de la condition militaire (HCECM) de septembre 2019″ argumente Jean-Pierre Woignier.
13e rapport septembre 2019 – HCECM
Seize militaires entre 2015 et 2017 mais plusieurs dizaines depuis 2002 dont des Gendarmes
Le père du parachutiste recense quinze militaires dans le même cas que son fils, c’est-à-dire décédés en service commandé mais n’ayant pas eu droit à la mention Mort pour le service de la Nation. Entre 2015 et 2017, certains autres militaires décédés dans des circonstances similaires se sont en effet vus accorder cette mention.
En réalité, les militaires et les Gendarmes concernés se comptent par plusieurs dizaines car la loi n° 2012-1432 du 21 décembre 2012 votée après la mort des militaires tués à Toulouse et Montauban par Mohamed Merah en raison de leur qualité de militaire est en effet rétroactive à compter de 2002.
Cédric Zewé du GIGN et de trois Gendarmes du GMG de l’Ardèche au nombre des Oubliés de la Nation
Parmi les Gendarmes concernés, figurent Cédric Zewé, du GIGN, mort dans le Var lors d’un exercice avec la Marine nationale et les trois membres du groupe Montagne Gendarmerie (GMG) de l’Ardèche décédés à l’entraînement en juillet 2013 à Chamonix lors de la rupture d’un pont de neige. L’adjudant-chef André Turquat, l’adjudant Emmanuel Potentier et le maréchal des logis-chef Olivier Rouch n’ont pas été déclarés morts au service de la Nation alors qu’en 2016, un légionnaire décédé à l’entraînement lors d’une avalanche l’a été.
Jean-Pierre Woignier qui se bat surtout pour que « son petit-fils soit reconnu Pupille de la Nation« , pointe du doigt des différences de traitement entre les morts.
Il fait ainsi part de l’« incompréhension des familles devant la reconnaissance automatique comme Pupille de la Nation des enfants des victimes d’attentats alors que ceux des serviteurs de la Nation qui se sont sacrifiés pour notre pays ne le sont pas ».
L’attribution de la citation à l’ordre de la Nation pour les policiers décédant accidentellement dans un accident de la circulation, de plongée ou de tir et la reconnaissance comme Pupilles de la Nation de leurs enfants et la perception à 100 % de la pension de réversion par leurs conjoints interpelle aussi la figure de proue des Oubliés de la Nation.
Deux propositions de loi
Le combat de Jean-Pierre Woignier a convaincu deux élus qui ont formulé des propositions de loi, l’une à l’Assemblée nationale et l’autre au Sénat afin de demander l’octroi de la mention Mort au service de la Nation aux militaires décédant accidentellement à l’entraînement en exercice opérationnel ou en mission intérieure.
Pour Jean-Pierre Woignier, soutenu par plusieurs associations patriotiques dont l’APNM Gendarmes & Citoyens qui a consacré un dossier sur le sujet dans son magazine, » ces propositions sont essentielles ». « Elles permettront de graver dans le marbre les conditions d’attributions qui ne seront ainsi plus décidées arbitrairement par un homme ou une femme« .
La différence entre Mort en service et Mort au service de la Nation
Concrètement, par rapport à la mention Mort en service, celle de Mort pour le service de la Nation offre une pension de réversion pour le conjoint de 100 % contre 50 %, le statut de pupille de la Nation pour les orphelins, et la reconnaissance mémorielle de la Nation qui se traduit par l’inscription sur le monument aux morts de la commune du défunt et un hommage lors des cérémonies officielles
Maurice Jolivet
Contact : 0672055935
jp.woignier@gmail.com
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