Un recentrage sémantique du chef des Gendarmes salué par le général Cavallier

0
Le général (2s) Bertrand Cavallier avec les gendarmes du groupement II/1 de Maisons-Alfort devant l'arc de Triomphe pendant la crise des Gilets Jaunes (Photo Lt-col Christian Gojard)

Le général de division (2S) Bertrand Cavallier, conseiller de la Voix du Gendarme, a tenu à réagir au billet publié par le chef des Gendarmes, sur son blog à l’occasion du 11 novembre, un texte qu’il qualifie de “fort et limpide”. Pour l’ancien chef de Saint-Astier, qui a aussi été instructeur à Saint-Cyr, attaché viscéralement à la militarité et passionné par la Gendarmerie qu’il n’a de cesse de défendre dans La Voix du Gendarme et sur les plateaux de télévision, ce texte marque un inéluctable retour aux fondamentaux, au Sacré, et un réarmement sémantique et idéologique.

Sur le même thème : Le patron des Gendarmes aux réservistes : “ nous aurons besoin de vous!

Tribune du général Bertrand Cavallier au sujet du billet du DGGN pour le 11 novembre

Le 11 novembre, le général d’Armée Christian Rodriguez diffuse sur  son blog le message que lui inspire la commémoration de cet armistice qui mettait fin à l’une des guerres les plus meurtrières qu’ait connues notre Patrie. Ce texte fort et limpide – à lire ci-dessous- se situe dans la pleine continuité du discours du 24 mars 2020 diffusé à l’occasion du second anniversaire du sacrifice du colonel Beltrame et intitulé “Ensemble, changeons le cours de l’histoire”, mais aussi de son courriel du 16 juin 2020 diffusé tous postes, où il rend notamment un hommage émouvant à son père, Gendarme, fils d’immigré espagnol.

II n’aura échappé à personne que ces écrits révèlent un recentrage sémantique puissant qui était attendu par tant de camarades consternés devant l’évolution des choses,

II n’aura échappé à personne que ces écrits révèlent un recentrage sémantique puissant qui était attendu par tant de camarades consternés devant l’évolution des choses, ou qui réveille tant de ceux qui, faute de l’entendre, l’avaient oublié et pouvaient s’accommoder de cette vacuité. Il ose en effet des mots qui avaient été délaissés depuis des années, avec cependant l’exception notable des rappels du général Roland Gilles, alors directeur général de la Gendarmerie nationale. (1)

Soyez fiers d’être ce que vous êtes, soyez fiers de faire partie de ce corps d’élite, pétri de l’exemplarité qu’imposent les principes d’honneur, de patrie, de valeur et de discipline” , “Chez celui qui choisit la carrière des armes, le courage est une vertu professionnelle parmi les plus hautes qui soient. Si la France sortit victorieuse de la guerre, c’est d’abord grâce au sacrifice et au patriotisme incandescent de ces Français de tous âges, de toutes conditions et de toutes origines, qui, tels le capitaine Fontan, s’engagèrent corps et âme dans le combat national.  Sachons aujourd’hui les honorer avec le respect qu’ils méritent”.(3)

Le réarmement sémantique constitue le préalable du réarmement idéologique qui permet de redonner du sens à l’action tant du quotidien que celle relevant de la crise,

Le réarmement sémantique constitue le préalable du réarmement idéologique qui permet de redonner du sens à l’action tant du quotidien que celle relevant de la crise, le général Rodriguez rappelant qu’“aujourd’hui comme hier, c’est en accomplissant son devoir aux jours de calme, avec rigueur, cohésion et discipline, que l’on se prépare à affronter les temps de crise, où de telles qualités sont plus nécessaires que jamais”

Le sens, c’est-à-dire le pourquoi de son engagement individuel et collectif :  “Être Gendarme, c’est agir, s’engager et combattre, en étant prêt à résister à toutes les tentatives visant ouvertement à contourner et détourner la République…/… Vous êtes indispensables et irremplaçables dans notre société démocratique pour répondre présent à l’appel des personnes vulnérables, des victimes, des plus faibles”. (4)

La France et le monde ont alors découvert le visage de l’héroïsme, celui d’un militaire de la Gendarmerie, celui d’un homme armé de son courage et de ses convictions. La France et le monde ont alors découvert comment une action individuelle pouvait changer le cours de l’Histoire. Membres du PSIG de Carcassonne, de la brigade de Trèbes, de la brigade motorisée de Trèbes, du groupe de commandement du groupement pour ne citer qu’eux, ils ont tous fait preuve d’un courage hors du commun et d’une détermination de fer, alors que les fondements de notre démocratie et de notre mode de vie étaient attaqués”. (5)

Ce pourquoi, c’est bien évidemment – et tous les mots sont là pour le dire- c’est celui la France, de la fidélité à son histoire, cette histoire qui l’a rend consubstantielle, c’est à dire de nature indissociable, à la République, à la Démocratie et aux valeurs qui leur sont constitutives. C’est celui de sa conception incomparable de la citoyenneté qui permet  à tout individu de se fondre dans son roman national, de s’approprier son passé pour mieux servir son présent et assurer son avenir. C’était l’un des crédos de Marc Bloch dans l’Étrange défaite. 

Intuition ou regard froid sur les faits, sans doute les deux à la fois, ces écrits – très convergents avec ceux du général d’armée Thierry Burkhard, chef d’état-major de l’armée de terre – révèlent bien la prise en compte de la montée des périls. De nouveaux périls certes différents mais qui menacent la pérennité même de notre Nation. Et donc l’impérieuse nécessité de se préparer, se densifier, de se ressouder. L’incertitude du sens qui induisait l’incertitude de l’action n’est plus.

Cette période qui faisait primer le bien être du Gendarme sur le primat de la mission n’est plus. Car le bien être, c’est avant tout celui du bien servir, celui de se redonner, loin de ces travers libertaires et consuméristes qui gangrènent nos sociétés occidentales. 

Bertrand Cavallier

Et tout est encore possible. “la Première Guerre mondiale adresse, encore aujourd’hui, une terrible leçon sur la férocité des hommes en guerre, mais aussi – oui, il faut le dire – sur leur incroyable ténacité et sur les réserves de bravoure et de sacrifice qui existent sans doute en chacun d’entre nous. Cette leçon-là, précieuse, nous ne devons jamais cesser de la méditer”. 

Oui,  en méditant ce qui démontrèrent nos ancêtres, tout est encore possible car chacun a en lui ces valeurs qui ne demandent qu’à être révélées, dynamisées, tonifiées. Oui tout est encore possible si on accepte de voir les choses telles qu’elles sont, et sortir de ce confort qui nous condamne – chacun le sait car c’est d’une telle évidence- et de revenir à la mission, au dépassement quotidien en osant afficher ses convictions. Comme le font tant de professeurs qui sont au coeur de la mère des batailles, celle de l’éducation, c’est-à-dire de la transmission de nos valeurs fondamentales qui ne peuvent supporter aucun accommodement, aucune compromission, fussent-ils avancés au nom d’une prétendue diversité qui n’est qu’un trompe l’oeil du séparatisme. 

Ce défi relève bien entendu avant tout du rôle des chefs. Là est la justification même de la hiérarchie de tout niveau. N’oublions pas ce que dit encore Marc Bloch : “la mollesse du commandement eut son origine avant tout, je crois, dans les habitudes contractées durant la paix”. Ce sont donc aux chefs de tout niveau de réagir, de faire leurs ces messages, de les concrétiser dans le quotidien, par leur engagement inlassable, et leur capacité à rassembler et susciter l’adhésion. A répondre présent dans chaque parcelle de France que constitue chaque circonscription. A répondre présent lors de chaque évènement.

Une vérité à laquelle on n’adhère pas est vaine, devenue une conviction, individualiste ou collective, elle est, comme toute réalité humaine, une force historique.”  Raymond Aron 

(1) Parce qu’il est fils des armées, le Gendarme est un militaire ;
parce qu’il est fils du territoire le Gendarme est toujours l’homme d’un terroir ; parce qu’il est fils de la loi le Gendarme en est le gardien intraitable ; parce qu’enfin il est fils du peuple le Gendarme en est le serviteur direct : extrait du discours du général Gilles à Hondschoote Septembre 2008

(2) Courriel du général d’armée Christian Rodriguez 16 juin 2020  

(3) Message du général d’armée Christian Rodriguez 11 novembre 2020

(4)  Courriel du général d’armée Christian Rodriguez 16 juin 2020 

(5)  Discours du 24 mars 2020 commémoration du second anniversaire de la mort du colonel Beltrame  Général d’armée Christian Rodriguez 

Demain, le 11 novembre…

Blog interne du général d’armée Christian Rodriguez, Directeur général de la Gendarmerie nationale, 10 novembre 2020. Texte reproduit sur sa page Linkedin par la lieutenante-colonelle Maddy Scheurer, porte-parole de la Gendarmerie.

Demain, le 11 novembre, en dépit des circonstances inédites, nous célébrerons la victoire de la France et de la démocratie au terme de la Grande Guerre. Vendredi 13 novembre, nous commémorerons, plus près de nous, les attaques djihadistes de Paris et Saint-Denis.

Le général Christian Rodriguez s’est adressé aux Gendarmes sur son blog et par vidéo (Photo Fanny Ferroli)

Malgré le contexte sanitaire, nous nous recueillerons à l’unisson de la Nation. Car, l’épidémie ne nous fera pas la mémoire courte.

Pour nous Gendarmes, la transmission, la mémoire – jamais figée, toujours vivante – constituent une ardente exigence. Rien jamais ne se bâtit sur du sable ; croire le contraire serait vain et présomptueux. Nous avons des prédécesseurs, nous aurons des successeurs. Nous sommes tout à la fois des héritiers et des passeurs : des maillons dans la chaîne des temps.

Voici un peu plus d’un siècle, s’achevait une guerre nouvelle, l’un des conflits les plus dévastateurs de toute l’histoire de l’humanité. A nous qui avons la chance de vivre en paix – une paix, certes, toujours à défendre –, la Première Guerre mondiale adresse, encore aujourd’hui, une terrible leçon sur la férocité des hommes en guerre, mais aussi – oui, il faut le dire – sur leur incroyable ténacité et sur les réserves de bravoure et de sacrifice qui existent sans doute en chacun d’entre nous. Cette leçon-là, précieuse, nous ne devons jamais cesser de la méditer.

Chez celui qui choisit la carrière des armes, le courage est une vertu professionnelle parmi les plus hautes qui soient. Peut-être est-ce même la plus obligatoire de toutes, si l’on en croit l’historien Marc Bloch qui avait lui-même connu les combats du front.

Pour le soldat, pour le Gendarme, faire preuve de courage, c’est d’abord faire son métier. Et, aujourd’hui comme hier, c’est en accomplissant son devoir aux jours de calme, avec rigueur, cohésion et discipline, que l’on se prépare à affronter les temps de crise, où de telles qualités sont plus nécessaires que jamais.

Au cours des quatre longues années qu’a duré le conflit, la Gendarmerie a contribué à l’effort de guerre, dans un contexte de puissante mobilisation de tout le corps social. A ses missions traditionnelles, notamment prévôtales, sont alors venues s’ajouter des tâches inédites, telles que la lutte contre l’accaparement des ressources sur fond de grave pénurie, le contrôle de la mobilisation et la protection des populations civiles. Déjà, il s’agissait de répondre présent à l’appel des Français pour maintenir les solidarités, préserver et rassurer, garantir la continuité de la vie de la Nation.

De nombreux Gendarmes montèrent au front pour participer à la défense du pays

De nombreux Gendarmes montèrent au front pour participer à la défense du pays. Aux côtés de leurs camarades, ils s’illustrèrent et tombèrent avec eux dans les tranchées, sous la pluie, dans la boue, moissonnés par la mitraille, sous le sifflement des obus dans le ciel gris du nord. Mais leur sacrifice pavait le chemin sacré de la victoire. Ainsi du capitaine Paul Fontan, héros de la Gendarmerie. Héros, il le fut deux fois : dans la paix, lui qui joua au péril de sa vie un rôle décisif dans la capture, en 1912, du fameux criminel Bonnot ; puis dans la guerre, alors qu’à la tête de ses troupes qu’il menait à l’assaut, il fut tué d’une balle en plein front, le 18 décembre 1914, dans la Somme.

Si la France sortit victorieuse de la guerre, c’est d’abord grâce au sacrifice et au patriotisme incandescent de ces Français de tous âges, de toutes conditions et de toutes origines, qui, tels le capitaine Fontan, s’engagèrent corps et âme dans le combat national. Sachons aujourd’hui les honorer avec le respect qu’ils méritent. Dans la mesure du possible, soyons présents aux cérémonies d’hommage. Et si nous ne pouvons l’être, prenons quelques instants, où que nous soyons, pour chérir en notre cœur le glorieux exemple de nos anciens qui donnèrent leur vie pour le pays. Soyons également solidaires de tous ceux qui font vivre la mémoire, l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, le Souvenir français, l’œuvre du Bleuet de France, toutes les associations qui se mobilisent. Continuons, nous aussi, Gendarmes, à participer à cet effort collectif !

Oui, j’en suis intimement convaincu : dès lors qu’on ne l’érige point en dogme, le passé peut être une force, une énergie vitale, un ressort essentiel. Ne dit-on pas qu’un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir ? C’est aussi valable pour la Gendarmerie. Notre histoire, celle de la France, nous invite à toujours rester en éveil, à l’affût du nouveau pour ne jamais nous laisser surprendre. Conservons la mémoire longue, c’est elle qui nous aidera à affronter le monde qui vient.