Le colonel de Gendarmerie en retraite Philippe Cholous, figure de l’Arme et notamment de la mobile, conseiller de La Voix du Gendarme nous libre ses réflexions sur “la non affaire de la tribune dite des généraux”.
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Le 22 avril dernier, a été publié dans l’hebdomadaire “Valeurs actuelles” une tribune écrite par un certain nombre de militaires, afin d’alerter l’opinion sur le délitement de la nation et les risques induits en termes sécuritaires et de cohésion du peuple français. Il est à noter que le constat fait par les signataires était initialement fort peu polémique, rejoignant d’une part le ressenti subjectif de l’immense majorité de nos compatriotes face à l’insécurité, d’autre part les analyses objectives car documentées de nombreux spécialistes de la criminalité, du grand banditisme, du séparatisme et du terrorisme. D’ailleurs, l’article passa dans un premier temps et très logiquement presque inaperçu.
Las, d’importantes échéances électorales approchant, il fut quelques jours plus tard instrumentalisé à des fins de diversion politique, obligeant le gouvernement et par conséquent l’état-major des armées, puis le directeur général de la Gendarmerie à réagir. Tombant dans une période de faible actualité, cette polémique relative au droit d’expression des militaires fut habilement exploitée par les média, au premier rang desquels les chaînes d’information continue, pour remplir leurs pages d’actualité et leurs plages de débats entre chroniqueurs et experts. La conséquence fut simple, cela divisa inutilement les militaires entre eux, beaucoup se sentant fondés à surréagir et à se répondre directement les uns les autres par média interposés, souvent en termes peu choisis. Le résultat est in fine désastreux.
Or y-a-t ’il vraiment lieu de se diviser là où la fraternité des armes et l’honneur inhérent à l’état militaire, auraient dû prévaloir et donc tous nous conduire à la plus grande mesure. En effet, la cohésion de la communauté militaire est un facteur de cohésion nationale. En ce sens elle est un bien précieux, qui vaut mieux que de stériles disputes. Malheureusement, à l’épreuve de la tempête médiatique elle s’avéra fragile.
Et pourtant, sur le fond nous sommes tous d’accord :
Les militaires d’actives et de réserve jouissent d’une pleine liberté de conscience, de culte et d’opinion ;
Ils n’en sont pas moins tenus au devoir de réserve dans l’expression publique de celle-ci ;
Les officiers généraux en deuxième section, restent tenus au devoir de réserve ;
Ils sont libres de renoncer à ce statut ;
Les militaires retraités n’y sont plus tenus ;
Par l’usage, ces-derniers peuvent accoler leur grade à leur nom, assorti de la mention « (er) » ;
Il leur est toutefois recommandé de ne pas le faire dès lors qu’ils expriment des convictions polémiques de nature à engager l’image ou la liberté d’action des forces armées, ainsi que la réputation de camarades ne partageant pas forcément les mêmes idées ;
Il leur est loisible de s’exprimer sans retenues dans les limites imposées par la loi, mais dépourvu des atours de leur grade militaire et de leur arme d’appartenance passés.
A titre personnel et d’expérience, il me semble que c’est une opportunité exaltante que de pouvoir tourner définitivement la page d’une carrière militaire, de mettre ses souvenirs dans la vitrine de tradition de sa résidence, pour mieux faire valoir les qualités personnelles que nous avons tous, dans des activités nouvelles, bénévoles, d’expertises ou salariées. Homme le plus puissant d’occident, louis VI fit étendre sa dépouille les bras en croix sur un tapis de cendres, pour montrer à tous qu’il revenait à la poussière. Dans le même esprit, les plus gradés des judokas japonais, revêtent à nouveau la ceinture blanche dès lors qu’ils sentent leurs capacités physiques décroître du fait de l’âge. N’est-ce pas là une partie du sens de la vie.
L’appartenance à la communauté militaire survit assurément à notre départ en retraite. De nature familiale, la fraternité d’arme qui en découle est une chance et un trésor. Restons donc unis entre camarades et entre forces armées, en temps de calme et plus encore de grands vents. Loin des querelles d’égos, seule la recherche du bien commun de notre Patrie, doit continuer de nous animer.