Les associations professionnelles nationales militaires de Gendarmes, Gendarmes & Citoyens et Gend XXI réagissent sur leur site internet et sur les réseaux sociaux à l’annonce de la création prochaine d’une Force d’Appui Rapide (FAR) au maintien de l’ordre dans la Police Nationale, précisément au sein des compagnies républicaines de sécurité (CRS).
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Plusieurs syndicats de police, dont le plus important chez les gardiens de la paix et gradés, Unité Sgp Police Force ouvrière, ne cachent pas leur scepticisme. Sur la page Facebook de Unité SGP Police Force ouvrière CRS , on peut lire que “ce projet laisse sceptique Alain Vastel, secrétaire national CRS syndicat Unité Sgp Police-Fo qui pose la question de l’intérêt de cette “Force d’appui rapide” alors que c’est déjà le cœur de métier de l’organisation des CRS que de répondre au côté nécessaire et immédiat d’intervenir”. Sur France Info, Alain Vastel qui “dénonce une absence de concertation” “voit quelque part dans ce projet une volonté de démantèlement des CRS dans leur organisation actuelle”.
Le manque de formation des commissaires
Aucune réaction officielle de la Gendarmerie ni des consultants spécialistes du maintien de l’ordre. Mais, sous les casques des “moblos”, qui “s’entendent super bien avec les CRS qu’ils considèrent vraiment comme de vrais pros malgré leurs contraintes liées à leur statut civil” , il se dit que la “FAR” “n’est pas une mauvaise idée en soi s’il s’agit d’avoir plus de monde sur le terrain et de soulager les Gendarmes qui ne sont pas assez nombreux”. « Mais, franchement, il y a plus urgent en matière de MO dans la Police, à commencer par régler le problème des interventions sur la plaque parisienne où c’est du n’importe quoi avec les BAC et le manque de formation flagrant au MO des commissaires de police qui conduit à des situations désastreuses comme à Nice”(*) dit un gradé de mobile très expérimenté qui a “le plus grand respect pour les CRS qui doivent comme nous obéir à des commissaires qui ne sont pas assez nombreux à connaître le MO, la grande majorité ne pratiquant pas ou trop peu”.
(*) où un capitaine de Gendarmerie mobile a du refuser les ordres d’un commissaire qui a d’ailleurs été mis en examen pour “complicité de violences volontaires” après l’affaire Geneviève Legay).
Pourquoi créer un doublon?
Gendarmes & Citoyens ne prend pas de gants et, un brin provocateur, n’a pas hésité à parler d“enfumage” et de “flûte” sur les réseaux sociaux en écho à un tweet du syndicat des commissaires de police qui trouve l’idée de la FAR “excellente”.
Résultat (!), le syndicat majoritaire et historique des commissaires a décidé de “bloquer” l’Apnm (l’empêcher de la suivre) comme il l’avait déjà fait avec l’autre Apnm Gend XXI.
Gendarmes & Citoyens pose le postulat que la Gendarmerie dont “le maillage territorial et son dispositif de montée en puissance est unique en son genre” “est capable structurellement de provoquer une projection rapide de forces avec un système d’alerte actuel largement éprouvé”.
Rappelant que les moyens existent déjà dans la Gendarmerie avec notamment le groupement blindé de Satory (GBGM) qui dispose de véhicules blindés capables de franchir des barricades et de protéger les personnels, l’association qui s’était déjà prononcé pour une sectorisation du MO devant les députés estime que
“la légitime rigueur comptable des deniers publics impose de la prudence entre un système actuel performant, fiable et un hypothétique besoin suggéré qui méconnaît ou sous-estime gravement l’existant”.
“La sagesse exige d’attendre, à minima, que les réflexions menées en collégialité au sein du “Beauvau de la Sécurité” “aboutissent” conclue l’Apnm.
L’appel de F.A.R pour les CRS
GendXXI pour sa part, dans un article titré par un jeu de mots “l’appel de F.A.R”, se montre pragmatique tout en épinglant une Police Nationale “plus que jamais fragilisée, poussée à la réforme par un Livre Blanc qui souligne sa désorganisation appelant dans son paragraphe 1.2 “à une réforme ambitieuse et profonde de la gouvernance de la police nationale” et ouvrant la voie à un Beauvau de la sécurité fondé sur les “7 pêchés capitaux”.
“Nous apprenons, après la mise en place des Directions Zonales de la Sécurité Publique (DZSP) qui devait théoriquement faire l’objet d’une expérimentation avant généralisation, la création d’une “Force d’Appui Rapide » écrivent malicieusement les responsables de l’APNM qui considèrent que “les Compagnies Républicaines de Sécurité sont des professionnelles du maintien de l’ordre, appelées à intervenir sur l’ensemble des villes de France, mais dont les spécificités statutaires et réglementaires agissent comme un frein inertiel.”
Estimant que “des CRS en alerte permanente représentent un coût non négligeable en récupération et primes et que le système par roulement hebdomadaire implique une disponibilité effective limitée et qu’enfin, la projection en 15 minutes nécessite également une gestion particulière de l’armement et des moyens spéciaux”, GEND XXI juge la mise en oeuvre de la FAR “difficilement compatibles avec le statut des policiers » d’autant qu’une présence au service induite par l’alerte permanente est considérée au regard de la directive européenne du temps de travail (DETT) comme du temps de travail, note l’Apnm.
Analysant une “emprise au sol” “trop faible » de ces unités au regard des délais de route et des modalités de transport en véhicule de petite capacité (4×4), GEND XXI se demande “quel sera l’impact sur le rétablissement de l’ordre avec quelques CRS en renfort 3 heures après l’alerte ».
Pour l’association professionnelle, “un escadron de gendarmerie mobile (EGM) peut intervenir aussi bien en métropole qu’en outre mer et le statut militaire de ces unités assure une disponibilité immédiate avec une capacité de montée en puissance inégalée sans générer d’heures supplémentaires”.
“Cette réforme parait à rebours du Livre Blanc et du Beauvau de la sécurité fondés sur la concertation autour des questions de sécurité » juge GendXXI qui préconise “une approche pragmatique et rationnelle ».
“L’ensemble des moyens doivent être évalués et mis en cohérence. La Gendarmerie doit pouvoir être associée dans une réflexion globale. Elle doit y tenir sa place, toute sa place, rien que sa place” conclut l’Apnm.
J.F