Une grande figure de l’Arme, le général Alain Lejoly, ancien chef de l’EOGN n’est plus

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Le général de division (2S) Alain Lejoly est décédé le 3 avril dernier à Bordeaux. Cet officier général qui a terminé sa carrière comme commandant de la 4ème région de Gendarmerie à Bordeaux était une des grandes figures de l’Arme qui a marqué nombre d’officiers ayant servi sous ses ordres ou effectué leur formation à l’EOGN lorsqu’il en était le directeur. Cet ancien d’Indochine et d’Algérie avait reçu comme consigne du président de la République de renforcer la formation militaire des officiers !

Grâce au général (2S) Vincent Coeurderoy, qui a « eu l’honneur et le plaisir de le servir plusieurs fois » et son fils, Brice, La Voix du Gendarme retrace sa riche carrière.

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Alain Lejoly, major de Saint-Cyr

Né le 25 juin 1932 Alain Lejoly a passé sa jeunesse à Bordeaux jusqu’à la préparation du concours pour rentrer en 1950 à Saint-Cyr (promotion Extrême-Orient).

Après 5 mois de stage corps de troupe au 110ème RI à Constance (Allemagne), il rejoint Coëtquidan en février 1951 et à l’issue de l’école spéciale militaires interarmes (ESMIA) il sort major de sa promotion et choisit l’infanterie coloniale. Il est nommé sous-lieutenant le 1er septembre 1952 après avoir épousé Colette Lacassagne quelques jours avant.

Tunisie, Indochine, Algérie à deux reprises et Tchad

Officier-élève à l’Ecole d’Application de l’Infanterie à Saint-Maixent, il choisit le 3ème régiment de tirailleurs Sénégalais à Bizerte qu’il rejoint le 1er octobre 1953. Le 1er décembre son bataillon est envoyé dans le Sud-Tunisien en  » maintien de l’ordre ». Avec sa section, il est affecté à Aouinet au nord de Gabès. Début janvier 1954, il rejoint le reste de sa compagnie à Sakhet dans le djebel Orbata. 

Le 1er mai il est désigné pour l’Extrême-Orient, et quitte la Tunisie le 26 juin 1954. 

Nommé lieutenant le 1er septembre 1954, il embarque le 14 septembre pour le Vietnam et débarque à Saïgon. Il est affecté au 26ème Bataillon de marche de tirailleurs sénagalais qui, descendu du Tonkin, cantonne à Phuto (Cholon). Le 1er octobre le 26ième BMTS devient le 1er Bataillon du 22ème régiment d’infanterie Coloniale. Il reste cantonné dans la banlieue de Saïgon jusqu’au début de 1955 où il fait mouvement sur Baria. Il sert alors sous le commandement du général de Crèvecoeur puis le général Gazounnaud. Le mois suivant le bataillon quitte Baria et s’installe à Thanh Thuy Ha et au bord du Donaï. Il est chargé de la garde du plus important dépôt de munitions du Corps expéditionnaire. 

Le 6 janvier 1956, Alain Lejoly embarque avec son bataillon sur le paquebot Aurelia à destination d’Alger. Cette unité est acheminée le 9 mars 1956 par train jusqu’à Tlemcen puis à Beni Bahdel où le PC s’installa au pied du barrage. Sa mission : contrôle de la vallée du Khemis et de la zone interdite qui avait été instaurée le long de la frontière marocaine. D’abord chef de section, le lieutenant Lejoly devint le 15 avril officier de renseignements du bataillon.

Son congé de fin de campagne terminé à Bordeaux, il est affecté à nouveau en Algérie. Embarqué à Marseille sur le paquebot Kairouan (en pleine bataille d’Alger), il rejoint le 28 décembre 1956 le 1er bataillon du 13ème régiment de tirailleurs sénégalais installé à la caserne d’Orléans à Alger. Début mars le 1er Bataillon du 13ème RTS quitte la ville pour le  » Sahel » d’Alger avec le PC à Ouled Fayet. La compagnie commandée par le capitaine Riffet dont le lieutenant Lejoly est l’adjoint et l’officier de renseignement s’installe à la ferme Vidal à Cheragas et assume la responsabilité du sous-quartier de Cheragas.

Citation à l’ordre de la division

Le 15 juin, il obtient un renseignement sur la présence à proximité de Cheragas du chef de secteur FLN. Il se précipite avec quelques tirailleurs, essuie une rafale de pistolet-mitrailleur mais abat le terroriste d’un coup de pistolet. Dans la foulée, après avoir interrogé sa compagne qui travaillait comme femme de ménage chez un haut-fonctionnaire logé dans l’enceinte du Palais d’été, il y mène une perquisition et récupère un pistolet qu’elle avait caché dans le jardin.

Ces actions ont été récompensées par une citation à l’ordre de la division et la croix de la valeur militaire avec étoile d’argent.

La Gendarmerie en 1961

Inscrit au tour de départ outre-mer et désigné pour servir en Afrique équatoriale Française, le lieutenant Lejoly atterrit 12 septembre à Fort-Lamy (aujourd’hui N’Djamena). Il est affecté à la 1ère compagnie du régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad stationnée au camp Dubut. Le 1er décembre le RTST devient le 70ème régiment de Marine. Cette unité assume l’instruction de ses personnels et de nombreux services d’honneur. En outre le lieutenant Lejoly effectue plusieurs fois par an avec sa section des tournées en brousse dans le Baguirmi, le Mayo Kebbi et le nord du Cameroun. Le 11 août 1960, le Tchad devient indépendant et la 1ère compagnie du 70ème RIMa, devenue la 1ère compagnie de l’armée tchadienne, défile revêtue d’un uniforme vert… Le 30 mars 1961, le lieutenant Lejoly, arrivé en fin de séjour, rejoint Douala par voie aérienne embarque le lendemain sur le paquebot Foucauld. 

Quelques jours plus tard le lieutenant Lejoly, candidat à l’école des officiers de la Gendarmerie, passe les épreuves écrites au moment où se déroule le « putsch  » des généraux à Alger.

Promu capitaine le 1er juillet 1961, il est admis à l’EOGN de Melun et est en stage à partir du 15 septembre. 

A l’issue, nommé capitaine à compter du 2 avril 1962, il choisit l’escadron 3/3 de gendarmerie mobile implanté à Luçon (Vendée). 

Le 1er septembre 1964 il est admis par concours à l’École d’état-major et en stage à l’École militaire à Paris. Diplômé d’état-major à l’issue, il est affecté le 15 février 1965 à l’état-major de la 4ème région militaire à Bordeaux au titre de la zone de Défense, comme rédacteur au 3ème bureau-opérations. 

Instructeur combat et professeur d’histoire militaire à l’EOGN

Le 1er octobre 1967 il est affecté à l’EOGN où il cumule les fonctions d’instructeur combat, professeur d’histoire militaire des élèves-officiers et commandant de brigade des sous-lieutenants issus de Saint-Cyr en stage d’application. Il est nommé chef d’escadron le 1er août 1970.

Admis sur concours à l’École supérieure de guerre il en suit les cours à l’École militaire à partir du 1er septembre 1970. Pendant le stage, il participe à un voyage d’études à Berlin et un autre en Yougoslavie qui se termine à Venise.  A l’issue il est breveté d’études militaires supérieures.

A la tête du groupement de Haute-Corse

Le 1er août 1972, il est affecté à la tête du groupement de Gendarmerie de Bastia (Haute-Corse). Outre la délinquance ordinaire, il doit lutter contre le terrorisme nationaliste (la caserne où il a son bureau a été plastiquée ainsi qu’une vedette dans le port) dans un contexte pollué par les combines politiques et l’omerta !

Le 15 août 1975 il est affecté à l’état-major des armées division emploi (boulevard Saint-Germain) où il est spécialement chargé de la Défense opérationnelle du territoire. Il est logé avec sa famille dans la caserne de la Garde républicaine place Monge.

Il est promu lieutenant-colonel  le 1er juin 1976 et chevalier de la Légion d’honneur le 18 du même mois.

Le 1er mai 1977 il est nommé commandant du 11ème groupement de gendarmerie mobile à Bouliac (33), coiffant les huit escadrons d’Aquitaine. Il est nommé colonel le 1er juin 1979.

Renforcer l’esprit militaire de la formation à l’EOGN

Le 1er septembre 1980 il est nommé commandant de l’EOGN avec pour consigne du président de la République de renforcer l’esprit militaire de la formation. L’école participe au défilé du 14 juillet. Entre septembre 1981 et mai 1982, il est en même temps auditeur de la 34ème session de l’Institut des hautes études de la Défense nationale (IHEDN) et dans ce cadre participe à un voyage d’études au Japon, en Corée du Sud et à Hong Kong.

Le 1er juillet 1983 il est nommé commandant de la 2ème région de Gendarmerie (Légions Nord-Pas-de-Calais, Picardie et Haute-Normandie).

Le 1er juillet 1986 il est nommé commandant de la 4ème région de Gendarmerie (Légions d’Aquitaine, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes et Limousin).

Il est promu général de division le 1er janvier 1987.

En mai 1988, pour remercier la Gendarmerie de sa coopération dans la lutte contre les terroristes de l’ETA, le gouvernement espagnol lui confère la croix d’argent de l’ordre du Mérite de la Guardia Civil.

Il demande sa mise en 2ème section à compter du 10 juillet 1989 et se retire avec sa famille à Bordeaux.

Le général Lejoly était officier de la Légion d’honneur et du mérite et titulaire de la croix de la valeur militaire.

Ses obsèques ont été célébrées dans l’intimité familiale compte-tenu des circonstances. Une messe de recueille­ment sera célé­brée ulté­rieu­re­ment à Bordeaux-Caudé­ran
A son épouse, à son fils et à sa famille, la Voix du Gendarme présente ses condoléances attristées.

Il était le frère du résistant Michel Lejoly, mort en déportation, promu sous-lieutenant à titre posthume, titulaire de la croix de guerre avec palme, de la médaille de la résistance et de la Légion d’honneur. Une rue porte son nom à Talence (Gironde).