Les Gendarmes de montagne pleurent Alain Iglesis, dit Julio, qui a sauvé des centaines de vies

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Le monde du secours en montagne, et plus spécialement les Gendarmes de montagne mais aussi la communauté chamoniarde pleurent Alain Iglesis dit « Julio », une très grande figure du PGHM de Chamonix qui a fait plus de cent fois l’aiguille verte et est celui ayant réalisé le plus de secours au monde.

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Le PGHM de Chamonix où ce Pyrénéen d’origine a passé 27 ans de sa vie de 1982 à 2001 et de 2010 à 2018 – il aussi servi au PGHM d’ Annecy et à celui de la Réunion- lui a rendu un hommage officiel ce lundi avec l’association Sebio Solidarité secours en montagne lors d’une veillée diurne à la DZ des Bois où est stationné Choucas 74, l’hélicoptère du détachement aérien de la Gendarmerie (DAG), avec lequel il a si souvent volé.

Cet alpiniste de 61 ans, installé comme guide de haute montagne à Chamonix, progressait seul à pied pour son plaisir lorsqu’il est mort emporté le 19 mai par une avalanche de plaque à vent déclenchée sur l’arrête des Cosmiques. Il a été retrouvé par ses camarades du PG enseveli sous un mètre de neige. Malgré la mobilisation rapide de cinq secouristes qui l’ont sorti de l’avalanche, Alain Iglesis n’a pas pu être ranimé. C’est un autre alpiniste ayant vu l’avalanche qui a donné l’alerte.

Il était sur l’arête des Cosmiques et il se sentait sûrement en sécurité. Mais il y a un petit couloir à traverser et l’avalanche est partie de là », retrace auprès de France 3 le colonel (ER) Blaise Agresti, ancien chef du PGHM, guide de haute-montagne et grand ami d’Alain Iglesis.

L’hommage de son ami Blaise Agresti

« C’était un homme exceptionnel. Il avait un regard d’enfant sur la montagne. Il a gravi plus de 100 fois l’Aiguille Verte. Il avait une grande sensibilité. C’est aussi l’homme au monde qui a sûrement réalisé le plus de secours en montagne. Il a refusé pendant des années d’être gradé pour rester sur le terrain. Il avait même été à La Réunion pendant quelques années. Il a sauvé des centaines de vies pendant sa carrière,” dit Blaise Agresti

Il a refusé pendant des années d’être gradé pour rester sur le terrain.

Blaise Agresti

Pour Julio : la magnifique et émouvante lettre du PGHM de Chamonix à Alain Iglesis

Ses camarades et amis du PGHM de Chamonix ont écrit cette lettre à Alain Iglesis qui a été publiée sur la page Facebook de l’unité.

Pour Julio.19 mai. Comme pour célébrer la réouverture de l’Aiguille du Midi, un soleil radieux est venu rehausser après une trop longue absence, la splendeur de l’arête des Cosmiques. Les nouvelles neiges ont ceint d’un blanc immaculé ses pilastres dorées qui se détachent fièrement dans un ciel azur. Le temps est comme suspendu. Dans la froide quiétude des hautes altitudes, le Mont-Blanc contemple l’un de ses fils, endormi contre lui. Emporté par une avalanche à 12h30, Alain Iglésis vient d’achever sa dernière ascension.Julio s’en est allé. Abasourdi, le monde de la montagne se réveille orphelin et inconsolable. Déchirement suprême pour ses camarades qui n’ont pu ramener celui qui sa vie durant en avait tant sauvées. Nul ne restait indifférent à la bienveillance discrète de ce pyrénéen tombé amoureux des Alpes, où pendant plus de trente ans il veilla sur les alpinistes en perdition. Difficile d’imaginer combien lui seront éternellement redevables. Dans le silence compassé laissé par sa disparition, on murmure qu’il en aurait secouru plus de mille. Qu’importe le nombre tant il paraît vain d’espérer mesurer l’extraordinaire abnégation de cet ange gardien de la montagne. De celle que l’on ne voit plus, ou que l’on ne voit guère. Un dévouement dont les mots peinent à saisir l’insondable profondeur.C’est aussi le compagnon que nous souhaitons saluer ici. Un homme entier, taillé dans ce bois brut qui fait les montagnards. Un caractère trempé, sans prise aux cabotinages. Une bonté d’âme farouche et pourtant inexhaustible.Ce pour quoi tu acceptes de mourir, c’est cela seul dont tu peux vivre. En réservant son dernier souffle à celle qu’il avait tant aimé, il sublima la passion qui anima chaque instant de son existence. Fauché en plein élan, bien trop tôt pour ceux qui restent. Il vint au rendez vous fixé par le destin avec l’élégance de ceux qui ne se dérobent pas. Ceux que la montagne a décidé de garder près d’elle et dont les yeux ouverts pour la dernière fois ont reflétés les cimes resplendissantes et pures.Nous savons où retrouver au terme de l’ultime voyage, l’héritier d’Armand Charlet. Sur les flancs de cette aiguille consacrant les montagnards, et qui pleure aujourd’hui son plus fidèle cavalier. Vous qui bientôt vous élèverez à son sommet, s’il vous semble qu’une ombre s’attache à vos pas, si vous sentez une présence par dessus votre épaule, souvenez vous de celui qui par cent fois y laissa ses traces et qui veille toujours Là Haut.