Tribune de Jean-François Charrat, capitaine (H) de Gendarmerie, ancien porte-parole de l’APNM Gendarmes et Citoyens.
Alors que tout semblait bouclé concernant le remplacement à la tête de la Gendarmerie du général Rodriguez début septembre, dans l’ombre, certains prétendants ont fait rebattre les cartes.
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On savait que le savonnage de planche était une spécificité de la haute hiérarchie gendarmesque, mais il aura fallu qu’une dissolution de l’Assemblée nationale, aussi inopportune qu’absurde, et la nomination d’un nouveau ministre de l’Intérieur, vienne changer la donne. Il semble désormais que deux clans s’affrontent pour faire désigner son poulain. Les partisans du “c’était mieux avant” et d’un retour à une discipline et une autorité sans partage se fondant sur une “militarité” retrouvée contraste avec la poursuite de l’adaptation de la gendarmerie à une société qui avance vers une juste reconnaissance des sacrifices de ses personnels. La fermeture des consciences contre l’ouverture d’esprit. Un retour au passé contre un pas vers l’avenir.
Les tractations vont donc bon train et les impétrants se bousculent à la porte de Beauvau. Des noms circulent et 100.000 personnels sont pendus aux lèvres d’un ministre qui tergiverse plus par méconnaissance du milieu que par tâtonnement. En attendant il fait le tour des popotes, accompagné par le major général. Certains pourraient voir dans cette mise en lumière le signe d’un opportunisme débridé qui viserait à se positionner ou à susurrer le bon nom !
Quand on connaît la manière dont se font et se défont des carrières, on est en droit de s’interroger sur la longueur d’une telle prise de décision. D’autant qu’il s’agit d’un précédent puisque depuis la création de la Direction Générale en 1920, il n’y a eu, même durant la seconde guerre mondiale, aucune période de commandement provisoire.
Sans vouloir lui conseiller un quelconque nom, il serait temps, pour l’intérêt de l’Institution et de ses personnels que le ministre fasse sortir du schako un nom, si possible doté de qualités humaines et d’une légitimité reconnue par ses futurs subordonnés. Les défis qu’il devra relever sont nombreux et les dossiers qui s’amoncellent sur le bureau à Issy les Moulineaux méritent d’urgence une réponse.
En vrac, les déploiements outremer des escadrons de gendarmerie mobile et leur emploi exceptionnel et harassant, les 200 millions d’euros impayés de loyers des casernes, les départs non programmés avant la limite d’âge des militaires de tous statuts, les coups de boutoir de syndicats de la police qui cherchent à transférer certaines de leurs missions chronophages vers leurs “cousins” pandores, sont autant de sujets qu’il faudra bien résoudre rapidement.
On va même s’autoriser à lui soumettre l’idée de rendre sa voix à la concertation interne et lui redonner la place qu’elle semble avoir oublié depuis plusieurs années et qui devrait être la sienne.
Face à cette guerre des étoiles, le cirque d’hiver pourrait bien reprendre du service. A moins que la raison l’emporte sur les petites intrigues égotiques.
JF C